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logo blog La fin de l’insouciance Vive la sobriété

 Et si la sobriété était constitutive de la pédagogie Freinet ? 

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Travail autodéterminé et sobriété joyeuse

Merci Jean pour cette analyse stimulante. Avec les enfants passant dans nos classes, depuis au moins 30 ou 40 ans, on voit bien à quel point l'imaginaire capitaliste tentaculaire et son avatar consumériste imprègnent les esprits dès le berceau. Et on sait que l'aliénation à la "magie fonctionnelle" du dernier capitalisme (qui, je l'espère, sera le dernier tout court) ne touche pas à égalité les enfants des différentes classes sociales. Ce qui ne peut que nous mobiliser en tant que praticiens d'une pédagogie populaire.

Ce que dit ton texte de la distance au travail, diffusant dans le corps social dès la prime "enfance capitaliste", me suggère quelques remarques en tant que pédago Freinet. "L'éducation du travail" de Célestin mettait en avant le travail-jeu comme un moteur essentiel de notre pédagogie, dans le contexte d'une France rurale et majoritairement ouvrière où les enfants avaient encore une relation sensible, concrète avec le travail de leurs parents.
Ton texte montre bien à quel point le capitalisme et sa promotion fallacieuse du ludisme a désarmé toute une culture du travail.

Contre une certaine doxa très partagée aujourd'hui, je ne crois pas pour autant que les enfants de 2023 soient très différents de ceux de 1923. Et je suis de ceux qui, derrière Freinet et après 35 ans de pratiques du même nom, soutiennent résolument que "ce n'est pas le jeu qui est naturel aux enfants mais le travail" (invariant 10ter). Les présentations multiples d'oeuvres coopératives par les enfants de mes classes, après un travail désiré, exigeant, débordant régulièrement sur les récréations, m'en ont largement convaincu.

Quand le meilleur joueur de foot ou la plus grande spécialiste de rubik's cube ont droit de fait à un succès d'estime dans la cour de récréation, les multiples productions et créations qui font le quotidien de nos classes offrent des moments de reconnaissance à tou.tes, chacun.e étant appelé.e à "prendre à son tour la tête du peloton" selon la formule de Freinet. J'y vois un des sens (anthropologique) de l'invariant n°1 "l'enfant est de même nature que l'adulte". Comme l'adulte, l'enfant aime s'investir dans un travail auto-déterminé, ayant du sens en soi et pour soi, où il peut manifester une puissance d'agir, de penser, conduisant à des oeuvres à valeur d'usage. Ce que le capitalisme interdit à tant de travailleur-ses.

Le travail-jeu tel qu'il avait été caractérisé par Freinet, dans un certain contexte socio-historique, mériterait sans doute d'être redéfini. Mais les pratiques en Méthode naturelle dans les différentes disciplines laissent la part belle au travail, fondé sur le désir et une exigence orientée par les pratiques sociales de référence. Nous faisons en classe des maths comme le font les mathématiciens, de l'histoire comme les historiens, de l'écriture comme... à hauteur des enfants et des jeunes. Et ceux-ci s'y investissent en conséquence.

Comme tu le laisses entendre à la fin de ton texte, une pédagogie Freinet poussée à l'extrême pourrait s'accommoder d'un matérialisme a minima (du papier, des crayons, l'être et son vécu dans un milieu coopératif).
En somme, la quête de la simplicité pédagogique participant d'une sobriété joyeuse.

Amicalement
Pierrick
GD35 - Secteurs LRC et maths - Collège des compagnons