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En Chantier n°9 : Un atelier de philosophie et de littérature

 

Un atelier de philosophie et de littérature au Lycée expérimental

ou

Quand élèves et enseignants apprennent ensemble

Un travail raconté par Carine Cesbron, enseignante de Lettres

au Lycée expérimental de St Nazaire

Le cadre

    Au lycée expérimental de Saint-Nazaire, nous avons la chance de travailler les matins en «atelier» pendant quinze jours, soit 22 heures de travail, avec un même groupe d’élèves et deux enseignants. C’est le groupe qui décide des méthodes employées pour traiter le sujet de l’atelier. Ici, l’enseignant de philosophie, Nicolas Novion, les élèves de terminales L et moi-même devions étudier une œuvre au programme du bac : les Pensées de Blaise Pascal.



    Au lycée expérimental, les élèves et les enseignants sont amenés trois fois dans l’année à gérer l’établissement pendant une quinzaine (secrétariat, repas, entretien…), et ne peuvent donc suivre toutes les activités pédagogiques. Des élèves de terminale dans ce cas ont demandé à l’atelier des notes claires pour pouvoir bénéficier du travail fait par les autres. Le groupe, après discussion, décide que chaque jour un élève ou un MEE (Membre de l’Equipe Educative), à tour de rôle, prendra des notes et les reformulera pour le lendemain.



Une réflexion collective

    L’entrée choisie par le groupe pour aborder Les Pensées de Pascal était «la justice». Les pensées de Pascal sont constituées d’une suite de fragments plus ou moins longs. Nous sélectionnons les pensées qui traitent plus particulièrement de ce thème, et tout le groupe a une heure pour noter tout ce qu’il comprend de ce que dit Pascal. Pendant l’échange en grand groupe, le volontaire du jour prend des notes. Voici le texte qui est distribué à l’ensemble du groupe le surlendemain :

voir ce texte en annexe I

    Le travail vaut surtout pour celui qui fait le travail de clarification : reformuler pour que des absents comprennent…Comment reformuler clairement ? La feuille est distribuée à tous et tous les participants trouvent le compte-rendu clair. Du coup, très vite, seul le «scripteur» prendra des notes pendant l’atelier, les autres participants sachant qu’ils auront des notes claires le lendemain. Cela n’a pas posé problème dans la mesure où chacun le faisait à son tour.



S’approprier une œuvre complexe

    Les concepts que Pascal utilisent ne sont pas simples, et surtout l’œuvre est lacunaire. Les élèves se lassaient des confrontations d’idées et de stylistique, et Nicolas et moi avons donc réfléchi à la façon de relier tous ces concepts dans une compréhension plus globale de l’œuvre. Nous leur avons donc demandé de représenter l’œuvre par un schéma, un dessin, un tableau, au choix, quelque chose qui «figurait» les Pensées. Nous-mêmes sommes partis dans une autre salle, et voici le résultat.

voir annexe II : le tableau des élèves voir annexe III : le tableau des profs

    S’ensuit une confrontation des deux tableaux, celui des enseignants et celui des élèves, puis un échange des idées et chacun repart pour un deuxième essai riche des apports de l’autre groupe.

voir annexe IV : tableau de synthèse

    Il est important de ne pas se contenter de la première recherche. Nous, les «spécialistes» avions décidé de faire ce travail dans le même temps que celui des élèves, pour qu’il y ait réel échange. L’important dans cette démarche était que les élèves se rendent compte que le savoir est à leur portée, qu’ils peuvent le construire. Et que pour que cette construction soit possible, il faut pouvoir tâtonner, prendre son temps, faire des erreurs sans que cela soit considéré comme une perte de temps, mais faisant partie de l’apprentissage en lui-même.

    Et ce fut un bon moyen pour synthétiser tout le travail qu’on avait fait, pour que les élèves s’aperçoivent qu’on avait bien avancé sur l’œuvre. Une autre façon d’évaluer où ils en étaient de leur savoir.


Carine CESBRON

Annexe I

notes prises et reformulées par Alban,

élève de terminale L

Lycée expérimental de Saint-Nazaire


Fragment 94

Idées développées :
Il appartient à chacun de respecter les lois ou pas.
Un personnage qui possède la force peut être tyrannique ou pas : en fonction de son respect ou non de la loi, il sera juste ou tyrannique.
Un personnage qui plaide une cause juste, la plus juste soit-elle, s'il n'a pas la force il est impuissant.

La justice seule ne peut exister, idem pour la force :
    Justice seule = impuissante
    Force seule = tyrannique

justice tribunal = son idée de la justice
La justice tribunal est la seule justice possible, justice acceptée par tous
Justice basée sur :
    - la coutume
    - la commodité du prince
    - la législation

Loi du plus fort : il faut se baser sur les qualités extérieures pour le bien de l'ordre. Le fait qu'un homme ait quatre laquais le place en position de supériorité. Que sa cause soit juste ou pas, je dois le laisser passer.

Aspect littéraire :
raisonnement logique, connecteurs logiques > « aussi» « et ainsi» « donc» ...
Pascal nous enferme dans son raisonnement où c'est lui qui fait les connexions. «Il est nécessaire que ...» le lecteur n'a pas le choix.
Enchaînement logique : cause/conséquence
Ce sont les mêmes mots qui reviennent (face/justice) > impressions de sermon.
Début de la pensée> «justice/force» : on assiste à la démarche d'écriture de Pascal. On a l'impression de le voir écrire. Il place les deux notions clés pour se lancer.
On observe son esprit, sa démarche de scientifique > une idée par paragraphe, connections logiques. Le Pascal scientifique très présent dans le Pascal écrivain.

Fragment 47

Idées développées :
Relativité de la justice > ce qui est juste dans une situation est injuste dans une autre situation. Ce qui est brave d'un coté de l'eau est criminel de l'autre coté.
mention de la guerre
La justice entre les Etats dépend des querelles entre les princes. Ce qui est juste dans un Etat ne l'est pas forcément dans un autre.
Contexte de guerre > liaison avec le fragment 56
«Mon ami ...» > ils peuvent être amis mais dans un contexte de guerre ils sont ennemis, c'est une attaque de la raison. La raison voudrait qu'ils ne se battent pas puisqu'ils sont amis. Mais la justice et la raison ne font pas bon ménage pour Pascal. La commodité du Prince prévôt sur notre idée de la justice.

Aspect littéraire :
Fiction/dialogue
Décalage anecdote : petite scène bucolique au bord de l'eau <> ce qui a lieu réellement : un meurtre. C'est ironique quand même! !!! !!!!!!! !!

Fragment 56

Idées développées :
La recherche du «souverain bien» = bonheur
> réponse des philosophes, de la raison ; Pascal examine la force de la raison dans le deuxième paragraphe. Que peut nous apprendre la raison du souverain bien?
Conclusion : «nous voilà bien payés !», les sages, les philosophes sont décrédibilisés par Pascal. Écho fragment 47 avec la métaphore de la rivière : «plaisante justice qu'une rivière borne» Il faut avoir lu le fragment 47 pour comprendre.
Pascal nous présente son idée une première fois (F.47) et nous laisse y réfléchir sans rien justifier ou donner son avis. Il précise dans le fragment 56.

Il n'y a pas de loi universelle.
> Nos lois sont stupides

Ordre fragment 47 puis 56 : apparition d'un ordre ce qui laisse le temps au lecteur pour le cheminement de sa pensée.

Fondement mystique de la loi : «Qui leur obéit parce qu'elles sont justes, obéit à la justice qu'il imagine, mais non pas à l'essence de la loi.»

Aspect littéraire :
«il» du 3ème paragraphe serait l'homme en général. Ici il s'agit de celui qui ne sait pas, qui se trompe mais dans d'autre fragment il s'agit de celui qui sait.
Mouvement concessif: « s'il la connaissait il n'aurait pas établi cette maxime»

 

Fragment 63

Idées développées :
La loi est faite pour tous, mais le peuple pense que ceux qui font et décident des lois sont au dessus d'eux. Il est bon pour cette élite de laisser cette croyance perdurer car elle le sert, et permet au peuple d'être heureux.

Il ne faut pas expliquer tout le mécanisme au peuple. Il ne faut pas expliquer que la loi est faite pour celui qui la subit et non pas pour celui qui la fait. Pascal nous dit qu'il doit y avoir des gens qui savent et d'autres qui croient. Dans le cas présent et malgré le risque pour le pouvoir en place il faut le dire au peuple : occupez vous de mes brebis, c'est pour votre bien.
C'est l'idée d'un mal pour un bien qui revient souvent chez Pascal.

Aspect littéraire :
«injustice» Pascal indique le sujet de sa pensée au début du fragment.

Nous avons à faire à un Pascal très autoritaire comme souvent: «Il est dangereux de ...» «mais ...» «Il faut donc ...»
Son raisonnement est très orienté, il ne laisse pas le choix au lecteur.
Citation en latin, culture chrétienne.

Alban, mars 2009

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Annexe II : tableau des élèves

 

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Annexe III : tableau des profs

 

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Annexe IV : synthèse profs / élèves

 

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Ce travail a été réalisé par le groupe Doc2d (Recherche documentaire au second degré)
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le tableau dans tout ça ?

Je ne comprends pas bien le tableau !