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Objets non identifiés

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Novembre 1998

 

 

CréAtions 84 - Objets transformés - publié en novembre 1998 -

Collège Kleber Thoueilles, Monsempron Libos (Lot et Garonne) – Enseignant : Hervé Nuňez

Objets non identifiés

  Je veux refaire un cheminement empirique qui a permis à un investissement de chercher sa forme sur une longue période de l’année, faisant fi du saucissonnage dans le temps des séances. Ignorant la rentabilité qui aboutit à l’embourbement du sens dans lequel pourtant, d’autres disciplines que les arts plastiques, ont déjà été engluées.
Je me suis donc "laissé aller" avec des classes de 6ème à prendre en considération l’aléa et à laisser au temps l’occasion de construire par lui-même un projet.
 
Première étape : hiéroglyphes et ruines


A peine nommé dans l’établissement, les professeurs de français et d’histoire m’ont proposé de me joindre à eux pour accompagner les élèves à Figeac dans le but de visiter le Musée Champollion.
Je me suis rendu sur place à l’avance, sur mon temps libre, pour découvrir le site, pour visiter l’exposition. Mon intention était simplement au départ de trouver des moyens pour que les enfants s’approprient la future visite.
J’ai passé un week-end dans cette ville très attachante jalonnée de signes témoignant du passé et du présent : des rues en voie de rénovation moyenâgeuse, des étalages de magasins mettant bien en valeur et de manière toujours créative les commerces qu’ils signalent.
Tout cela semblait propice à l’investissement esthétique ou plastique de celui qui a envie d’ouvrir l’œil.

 Enfants prélevant l’empreinte

J’ai demandé aux enfants de prélever l’empreinte d’un des signes
sur la pierre en creux, en leur expliquant que le signe choisi serait
reproduit pour l’inclure dans une écriture qu’ils allaient inventer.

 Mais je pensais que j’allais devoir accueillir près de 100 élèves de 6èmeen une journée, soit deux vagues de quatre classes de 24 élèves, la première le matin, la seconde l’après-midi. La proposition des collègues était en fait "d’occuper" une classe pendant l’heure de visite du musée par une autre.

Le planning était très serré :

Matin :
- départ du collège d’un groupe de deux classes de 6ème à 8 heures ;
- trajet : une heure bien pesée ;
- visite du musée (une heure) ou "occupation" des élèves (en alternance) ;
- retour au collège

Après-midi :
- accueil du nouveau groupe de deux classes et même investissement ;
- retour au collège pour 17 heures.  heures.                                                                                          

   Un musée, deux œuvres qui se répondent

Champollion : le premier "moderne" à avoir lu l’écriture des Egyptiens.
En marchant dans les rues, je m’apercevais que moi aussi j’étais sans cesse en train de "déchiffrer". Je pensais donc qu’il serait bon d’emmener les enfants à exprimer leur propre "déchiffrage" de la ville.
Comme le musée se trouve au centre ville, je ne pourrais pas les "lâcher" dans les rues comme je l’avais fait à Angles-sur-l’Anglin : les enfants s’étaient éparpillés à leur gré pour rapporter des trésors de choses "en voie de déchiffrage". Ici, il y avait trop de circulation.
Il fallait trouver autre chose…
La municipalité de Figeac a demandé à un artiste de faire quelque chose dans la ville. Il n’a pas été choisi au hasard :

Josef Kosuth est un artiste "conceptuel" américain et il développe depuis plusieurs années un travail sur le signe, sur les « mots et les choses » comme dirait Foucault. A Figeac, il a produit un "environnement" qui a une qualité pédagogique. On "tombe" dessus en allant dans la direction du musée car celui-ci occupe tout le volume d’un ancien pâté de maisons :
- au sol, une pièce d’un seul tenant en pierre. On peut se déplacer dessus. Il s’agit d’un agrandissement de la pierre de Rosette ;
- sur un des longs murs délabrés qui l’entoure, on aperçoit une baie fermée par une vitre sale. A l’intérieur, sur un support indéterminé, on lit assez difficilement la traduction française du texte de la pierre de Rosette.

Enfants écrivant dans la halle

Avant de partir, j’avais préparé 24 pinceaux plats de 3 cm de large
(avec l’aide d’élèves volontaires), cent bandes de papier journal vierge
de 21,540 x 1 m, plusieurs grands pots de peinture gouache très liquide,
des chiffons.
Nous nous sommes donc dirigés vers une halle assez vaste qui ne se
trouve pas loin du site. Celle-ci allait nous servir de table (sans pieds)
pour nos écritures « publiques » puisque c’était jour de marché.
L’enfant devait recopier le signe qu’il a prélevé mais il devait aussi en
inventer d’autres « à sa façon » pour former un mot de son choix
(j’avais demandé d’écrire "à l’égyptienne", c’est-à-dire sans voyelles).

J’aurais pu…

J’aurais pu solliciter les enfants pour qu’ils imaginent le passé de ces vieux murs que l’artiste a décidé de préserver en l’état.
En s’appuyant sur les traces existantes, sur les restes d’escaliers, sur les couleurs et les motifs délavés des tapisseries, et en faisant appel à leur perception, ils auraient dessiné ce qu’ils imaginaient du lieu, quand les maisons étaient débout. De retour en classe, on aurait pu réaliser des maquettes "à la manière des maisons de poupées".
Sans imiter l’artiste, cet investissement aurait mis en valeur l’idée de déchiffrage chère à Kosuth, elle aurait enrichi la portée de celle de Champollion.
Mais j’ai choisi de rester plus proche de Champollion (on n’a pas toujours les bonnes idées au bon moment, et il m’était d’autre part impossible de demander aux enfants les leurs, vu leur nombre et le temps imparti). Si nous avons regardé l’œuvre de Kosuth, c’est oralement, comme on regarde une "image".
 

Découpage des bandes

De retour en classe, les bandes ont été découpées, les lettres classées en fonction de celles de notre alphabet auxquelles elles se rattachent.

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