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Compte-rendu de la réunion de mars 2011

Réunion du Chantier de Pédagogie sociale, le 5 mars à l'école de formation psychopédagogique (EFPP), rue Cassette (Paris 6e)

 Présents : Pascale, Ewelina, Nadia, Anne-Marie, Francine, Emmanuel, Dominique, Corinne, Jean-Pierre, Laurent, Van Chien, Borys, Pierre, Jorge, Marie-Christine, Catherine  et Cécile.

 Présentation des personnes
Pascale : enseignante en Normandie.
Ewelina : sociologue, thèse sur les enfants des rues en Pologne
Nadia : participante du collectif de santé communautaire de Montereau
Anne-Marie : potière en gare
Bientôt le collectif de santé communautaire va participé à l’atelier poterie d’Anne-Marie : poterie-conte.
Francine : agent de développement social à la retraite.
Demande de Laurent : envoyé des stagiaires à Intermèdes.
Cécile : enseignante à la Maison des enfants de la Cartoucherie du Bois de Vincennes.
Emmanuel : Formateur pour adulte, parent de la Maison des enfants.
Dominique : réalisateur de documentaire, travail sur les relations entre école, adultes et les enfants…
Corine : Psychanalyste, participante au CA de l’EFPP
Jean-Pierre : Psychanalyste : travail sur la psychanalyse et l’éducation
Laurent : Membre de l’association d’Intermèdes Robinson, Membre du mouvement Freinet et professeur à l’EFPP.
Van Chien : Etudiant
Borys : Apprenti à l’association Intemèdes depuis deux ans
Pierre : étudiant en deuxième année à l’IRTS et stagiaire à Intermèdes Robinson
Jorge : musicien
Marie-Christine : directrice de l’école de l’EFPP, longue formation en tant qu’éducatrice spécialisée.
Catherine : enseignante, responsable du Nouvel Educateur (revue pédagogique du mouvement Freinet)
Excusés : Delphine, Hélène, Yves, Sophie et Frédéric ne pouvaient pas être présents aujourd’hui et nous l’ont fait savoir.
 

Visionnage du film : « Demain sera plus beau qu’aujourd’hui »

(Réalisation, D. Delattre 2011, diffusion « Un jour peut-être »)
 Ce film documentaire retrace l’évolution de 3 enfants de parents sans papiers qui ont déployé chacun à sa manière des efforts extraordinaires pour soutenir leurs parents. C’est un film qui fait réfléchir sur la violence politique et ses effets sur les enfants.
 

 Réactions, réflexions, suite à la projection, en présence de D. Delattre

« Les singularités permettent les ressemblances. Les rencontres improbables nous montrent des ressemblances au-delà de cultures différentes…
Point commun entre les enfants : leurs maturités sont à la fois positives et également le versus négatif qui les empêchent d’exprimer des parties d’eux-mêmes.
Les enfants dans le film soutiennent leurs pères. Les pères sont au devant de la scène et les mères sont parfois inexistantes.
Le concept d’hyper maturité signale une fragilité de l’environnement (attention avec le mot de la maturité).
Ils sont victimes de violences politiques.
Réflexion à mener sur ces impacts. »
 

 

 

Parfois on a besoin (ça doit être le cas pour moi ces temps-ci) de demi-teintes pas trop violentes voir très pâles et la couleur des photos parfois m'agresse tout simplement.
Alors que dans le noir et blanc de tes photos je vois juste la lumière, peut-être le reflet de notre respiration commune, comme un souffle qui arrive à me faire revivre dans un lien social.
Alors qu'un apport trop fort d'oxygène serait brutal voir peut-être fatal, ça arrive.
Est-ce que c'est pas la même chose pour la marche par rapport à la course, le murmure par rapport au cri ? Même peut-être la réflexion et l'échange dans l'écoute mutuelle par rapport à l'altercation des débats agressifs ?
Parfois on a besoin de crier, de courir, d'agresser.
Mais samedi j'ai senti quelque chose de léger et paisible qui est bien exprimé par la lumière de ton noir et blanc.

A moi sans doute de trouver des couleurs fortes non agressives qui permettraient de traduire aussi cet air ambiant bienfaiteur.

Peut-être aussi que ce samedi la couleur devait être réservée au beau film de Dominique ?
Mais peut-être aussi tout simplement que je divague un petit peu...

Après le long temps d’échanges et de discussions du midi :

 Nous avons continué l’après midi par un « Quoi de neuf », qui nous a permis d’évoquer le démarrage des stages de poterie naturelle, à saint Amand, en lien avec le groupe de Surville (Montereau). Nous avons également évoqué la question de la transmission des expériences, du problème du « turn over » des acteurs engagés dans des innovations. Nous avons également échangé sur «l'école de rue», «l'école nomade» mais il était l'heure d'arrêter... mais Pascale de retour a écrit un texte qu'elle nous offre :
 
L'école ambulante à lire ci-dessous  ou   à télécharger en cliquant sur le lien

 

Enfin, nous nous sommes donnés rendez vous pour le prochain « Chantier »,  le 7 Mai de 10h00 à 16 h 30 à Traces, lieu dit « l’Usine »,  (23/25 rue Ramponeau 75020 Paris- Métro Belleville)

 

L'ECOLE AMBULANTE
 
On ne peut plus bricoler des réformes, mettre des pansements sur les plaies qui se nécrosent sans mettre à plat l'ensemble des problématiques d'éducation qui s'étendent bien au-delà de l'école.
(Lire à ce sujet le remarquable texte de Michel SERRES « Éduquer au XXIe siècle »:
 
Si le proverbe africain est infiniment vrai c'est tout le village, l'ensemble du monde adulte qui doit se remettre en cause et ça fait un sacré chantier en perspective donc le plus souvent....on bidouille chacun dans son garage et dans le meilleur des cas on coopère en petites structures professionnelles ou associatives.
 
Le rôle de chacun dans un projet éducatif peut-il être défini aussi clairement que l'avaient imaginé ceux qui ont fondé l'école publique, laïque et obligatoire que nous connaissons aujourd'hui?
A l'évidence non. On constate toujours des interactions volontaires ou pas, positives ou pas mais le plus souvent incontrôlées et incontrôlables dans la logique réductrice du « chacun son boulot ».
Les contrôler à la manière institutionnelle est une possibilité qui souvent débouche sur des rigidités administratives même dans les structures coopérativement déclarées parce que la vie n'est pas une institution.
 
St-Ex écrivait: « La vie crée l'ordre mais l'ordre ne crée pas la vie »
Cette petite phrase me sert souvent de garde-fou, d'étoile polaire quand je cafouille ou que je culpabilise d'être trop désordonnée, pas assez constante, insuffisante et …fatiguée de me battre contre les moulins à vent!
 
Aujourd'hui, je persiste à travailler dans un cadre qui devient de plus en plus contraignant: grosse structure, peu d'espace, peu de temps et un maximum de bâtons administratifs ou matériels dans les roues. J'ai souvent eu la tentation de larguer les amarres et d'aller voir ailleurs. Je l'ai toujours, régulièrement, en lisant les chroniques d'Intermèdes ou les écrits de Bernard Collot mais, en lisant les témoignages parfois désenchantés de ceux qui ont risqué l'aventure, je retrouve vite ce qui m'a toujours retenue.
 
Les écoles expérimentales qui ont tenté l'expérience d'autres pratiques en milieu non protégé sont rarissimes je crois. Ce que j'appelle « milieu protégé » c'est celui où les parents choisissent leur école, sa pédagogie et leurs enseignants...où ils choisissent aussi plus ou moins par élimination matérielle et sur la base d'une possibilité financière ou locale, associative, les camarades, le milieu dans lequel évolueront leurs enfants.
 
Comme avec les effets imprévisibles des OGM ou de l'abus d'antibactériens, les risques sont lourds à longue échéance sur bien des plans : la stérilisation du milieu ne rimant pas forcément avec la logique du vivant chère à Célestin FREINET.
 
Parmi eux, la pression que mettront immanquablement ces parents puisqu'ils financent ou participent concrètement à la vie de l'école (pression qui pensée positivement est un excellent moteur mais si elle vient de familles égocentrées et puissantes peut devenir très nauséabonde).
 
L'enfermement idéologique dans un univers artificiel: un « laboratoire », d'où les enfants comme les enseignants ou les familles perdent peu à peu l'idée de ce que les autres vivent, autour est aussi un choix qui peut s'avérer dangereux car il supposerait que d'autres structures identiques prolongent l'illusion dans la vie adulte, ce qui est loin d'être assuré.
 
Je ne fais pas ici une liste exhaustive, elle est ouverte sur trop de possibles...
 
Ce qui me paraissait positif dans l'idéal laïque, public et obligatoire c'était le brassage, le fait que nous ne choisissions pas plus que dans la vie en général tout ce qui allait entrer en résonance avec le mode éducatif que nous choisissions nous, en famille, pour nos enfants.
 
L'exogamie éducative, ça, c'était une sacrée révolution à l'époque des hussards noirs.
Elle a tout de même permis à des générations de gamins de sortir de leur milieu d'origine, de se frotter aux autres et de s'ouvrir à d'autres cultures... et parfois d'accéder à un meilleur niveau de vie que celui de leurs parents, dans le meilleur des cas évidemment, sans aboutir inéluctablement « au meilleur des mondes ».
 
Ce qui a permis cette ouverture vers les autres, ce fut un cadre institutionnel, assez rigide et assez contraignant avec des modèles discutables aujourd'hui, un esprit colonial y compris dans les provinces métropolitaines, et un formatage républicain « travail famille patrie » qui a montré ses limites, voire ses nuisances. Ce cadre, comme les réformes actuelles a été imposé « d'en haut » par des penseurs qui estimaient sans doute être plus intelligents que leurs congénères et détenir la vérité, le bon modèle...peu de coopération dans l'histoire ou toujours « en marge », peu de perméabilité des informations, des formations entre professions socialement impliquées dans l'éducation , la santé, l'aide sociale, la formation continue des personnes.
Le résultat est sous nos yeux.
 
Dans le chaos actuel, les fantassins de la république, où qu'ils soient placés dans la structure institutionnelle ont peu de pouvoir réel à changer celle-ci de l'intérieur. Le plus souvent, elle les use, les écrase, les sanctionne s'ils en ont trop publiquement la velléité affichée.
 
Alors, ne nous reste-t-il, «  la colère, rien que la colère... » comme l'écrivait Paul LE BOHEC ?
Il l'écrivait mais n'y croyait pas bien sûr puisqu'il a continué à se battre jusqu'au dernier mot contre l'absurde.
 
Il nous reste à mes yeux ce que nous partageons là : nos expériences mises en mutualisation, nos idéaux mis en pratiques avec humilité sur nos terrains, quels qu'ils soient, notre amitié et nos convictions profondes dont celle qu'en travaillant sur ceux que nous sommes, nous faisons évoluer la structure à laquelle nous participons car elle n'est pas plus indépendante de nous que nous ne le sommes d'elle.
 
Grains de sable, graines d'orties, structures différentes toujours expérimentales, chacun apporte son écot au vrai changement. Plus qu'une école unique qui serait « autre », je crois à cette multiplicité de biotopes, à (c'est à la mode) la « biodiversité » éducative et à la création de ces réseaux par lesquels l'information peut devenir co-formation en tous lieux et à chaque instant, je crois aux rencontres possibles des personnes, à leur implication morale et affective les unes envers les autres car être en cohérence éducative c'est aussi être en co-errance positive et constructive.
 
L'école à laquelle nous rêvons est peut-être une école nomade qui reste à inventer.
 
 
Pascale Borsi
-Mars 2011-
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

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