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Congrès Strasbourg - Atelier "Méthode naturelle de philosophie"

Dans :  Principes pédagogiques › 

Méthode naturelle de philosophie
Juliette Gasselin
 
Double projet dans cet atelier : aborder la Méthode naturelle (MN) et philosophie
Il s’agit de prendre n’importe quelle question, comprendre ce qu’on sait à ce sujet, et se mettre ensemble en chemin : aujourd’hui, posons cette question :
Qu’est-ce que c’est que la philosophie pour nous ?
La MN ça commence en disant « n’importe quoi » ; en faisant on apprend.
 
Des réponses :
Claudine : Un questionnement général pour savoir où on se situe dans la vie, dans le monde.
Nadine : L’art de penser le monde.
Guadalupe : Poser des questions, et pour la réponse … on verra
Lucette : L’objectif de la philosophie, c’est d’améliorer la vie, de vivre mieux avec soi-même, avec ses propres angoisses existentielles, avec les autres, accéder à une forme de bonheur…
Thierry : L’accès à un mieux-vivre, peut-être, mais pas toujours directement ; en effet, remettre en cause des certitudes peut être source d’anxiété…
René : Pour moi, c’est sentir que j’existe à travers ma faculté de penser, en deçà de l’éthique ; le résultat de la philosophie, c’est d’arriver à « se souffrir soi-même »: au départ, dans notre vie, qu’on a reçue, on est dans des constructions mentales qui se brisent progressivement, au fur et à mesure des expériences de la vie, dans le miroir. En  on finit par accepter d’être ce que l’on est : la philosophie m’aide à me connaître moi-même, elle m’aide à accepter ce que je suis. cf. Michel Henry et sa phénoménologie de la vie : être dans le temps présent. Je pense donc je peux. J’éprouve une joie profonde à être vivant ; j’éprouve une immanence radicale, une saisie de soi dans le silence. Comment le monde se manifeste à moi : c’est la phénoménologie (= approche du réel).
Martine : Qu’est-ce que l’homme et toutes ces sortes de choses ?
Philosopher c’est un acte personnel : cf. Schopenhauer « La vie oscille comme un pendule entre la souffrance et l’ennui » : souffrance de ne pas avoir ce qu’on désire ; ennui de ne pas être satisfait de ce qu’on a.
Étymologiquement : l’amour de la sagesse
Tentative de mise en cohérence ; l’art du doute : qu’est-ce que la certitude ? Cette thèse, est-elle acceptable ou non ? Du coup, on arrive à la notion de vérité.
Laetitia : Peut-être que la philosophie, c’est de se mettre en recherche, sur des sujets aussi divers que la vie, la complexité de la vie, et aussi chercher l’apaisement par ces questionnements.
Partage des idées, rencontre, expériences, travailler ses questionnements.
Questions universelles, qui traversent toutes les cultures :
Marguerite : De grands thèmes, de grandes questions qui, posées ensemble, qui permettent de s’enrichir en se questionnant
 
En MN, le prof doit maintenir la sécurité affective : tout le monde doit se sentir capable, personne exclu.
Question de l’apprentissage en MN : si on était dans une classe, on dirait à l’élève : « Dis-donc, René, tu as l’air d’en savoir long sur Michel Henry, tu pourrais nous proposer une présentation sur la jouissance de vie, avec quelqu’un…, tu peux le noter sur ton plan de travail » La MN propose à chacun de devenir auteur.
Nadine : Je pense donc je suis, et je suis avec les autres. Les élèves sont heureux d’être reconnus par leurs pairs, on le voit dans les classes quand on fait de la philosophie.
Un autre : Quand on philosophe, on part de soi pour aller vers les autres.
Un autre : On peut philosopher sans penser…
Encore un autre : Est-ce que tous les hommes philosophent ? Oui ! Non !
Christine : Non, pour philosopher, il faut faire une pause, ne plus être dans l’action, prendre le temps de ne plus agir ; il faut du silence…
Laetitia : Il ne peut y avoir de philosophie que s’il y a auparavant un temps de rêverie, de contemplation. Ce temps peut-être dans le texte libre, le dessin libre : j’ai l’impression qu’ainsi l’enfant a accès à son humanité, à celle des autres. Ce sont des moments structurants de solitude.
 
Nous venons de donner une définition très extensive de la philo : elle englobe des questionnements existentiels, universels, religieux, phénoménologiques, moraux, éthiques, ….
 
Nicolas : Quelles sont les conditions pédagogiques de cette pratique philosophique ?
Instaurer une qualité de silence
Travail
Rapport au groupe : Laurence : le groupe peut aider au découpage des concepts pour construire une pensée cohérente (cf. comparaison de Platon du philosophe avec un boucher) : les enfants accèdent à une pensée par la totalité de la discussion.
 
Mais le rapport au groupe : est-ce intrinsèque, inhérent à la philo ? Oui, le débat est le moteur de la philo pour certains… Alors, suffit-il de débattre pour philosopher ? Suffit-il de dire n’importe quoi pour commencer à philosopher ?
Question d’un enfant dans une classe : pourquoi existe-t-il des champignons mortels ? C’est l’occasion d’exercer sa capacité de penser. La formulation même sous-entend une causalité, et qu’il y a un principe organisateur.
 
Proposition de Nicolas GO : Dans ce genre de situation, on peut poursuivre l’interrogation : le mot « pourquoi » peut avoir deux significations : Pour quoi faire ?et Dans quel but ?
Avec les enfants, la philosophie n’est accessible qu’à condition que le discours du professeur contraigne leur discours pour faire accéder aux limites de ce qu’ils croient : ainsi ils accèdent au registre critique de questionnement. La formulation dépendra de leur âge, de leur niveau. Pour exercer une contrainte adéquate, et ne pas se contenter de laisser se confronter les opinions, il faut exercer des contraintes expertes.
On vient d’expérimenter un tâtonnement collectif : pas de fil continu de la pensée, désordre (contrairement à l’idée préconçue et scolastique)
Pour faire émerger l’ordre du désordre (cf. complexité), il faut interroger les concepts : faire travailler chaque concept, c’est-à-dire transformer les questions en hypothèses : Qu’est-ce que l’art ? Qu’est-ce que penser ?
C’est poser les questions ? Deleuze : la philosophie c’est l’art de poser les questions/distinction question/interrogation/problème…
 
COMMENT ON POSE UN PROBLEME AVEC DES ENFANTS ? Pour répondre à cette question, il faut rentrer dans un processus philosophique.
Projet de travail avec des enfants : comment intervenir pour leur permettre d’accéder à la philosophie ? On se met dans leur pas pour les contraindre à réfléchir à ce qu’ils disent.
cf. J T DESSANTI : La philosophie, un rêve de flambeur
En atelier philo, le participant rencontre la responsabilité qu’il prend de ce qu’il dit ; cela correspond à la prise collective de responsabilité de penser un problème. On ne peut découvrir les problèmes qu’on traite qu’a posteriori, en analysant le débat, par exemple en le réécoutant.
L’objet de la coopération est de modifier les rapports de pouvoirs en rapport de connaissance, et ces rapports de connaissance sont jubilatoires. Le désir de penser et de vivre ensemble dépasse le sentiment de frustration.
La question de l’accueil de la parole des enfants appartient à la catégorie de l’écoute. On présuppose un rapport d’amitié, dans ce rapport éducatif, on libère des puissances de vie. Dans ce contexte, l’amitié au sens grec, la philia des sages, est une condition de la connaissance.
 
Compte-rendu fait par Juliette Gasselin (29)