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Actualité de la Méthode naturelle Paul Le Bohec

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En Méthode naturelle Paul Le Bohec, on peut partir de n'importe quoi, pourvu que la pensée collective se construise.

 

Les composantes de la Méthode naturelle

 

        La profonde nouveauté et la sagesse de cette méthode, c’est de s’inscrire dans un paradigme de la complexité. Elle se fonde sur une appréhension globale de la connaissance. Ainsi, mille choses surgissent quand on la pratique. Elles sont de tous ordres et s’imbriquent tellement les unes dans les autres qu’il est impossible de les présenter de façon séparée et ordonnée.

            Dans les pages qui vont suivre, on doit s’attendre à trouver un peu de tout. D’abord, en dominante, l’affectivité partout présente comme catalyseur indispensable de l’acquisition du savoir. Mais également le plaisir, la pulsion de création, les joies de la connaissance, les phénomènes de groupe, les cheminements particuliers, les deux sexes de l’esprit, la recherche du pouvoir par le savoir, les bénéfices du travail communautaire, la diversité des situations et des caractères, la dialectique sagesse-folie...

Paul Le Bohec, Le texte libre mathématique, p.13, éd. ICEM

 

La Méthode naturelle de mathématique

 

           Pour moi, il s’agit uniquement d’expression-création. À la limite, je me fous des maths. C’est l’être entier qui peut se trouver intéressé par l’aspect jeu, expérimentation, occasion de liquider ses problèmes par compulsion de répétition en les usant progressivement jusqu’à extinction, comme un tampon encreur qui peu à peu se désencre à force de répétition du timbrage sans renouveler la provision d’encre... par fantaisie, petite folie, provocation, par intervention uniquement orale sur la création des autres, par prise de conscience, élargissement à la suite de l’intervention du groupe, par audace, par intuition fulgurante... Je n’ai pas d’intention didactique, mais je suis prêt à tout accepter. Et il y a un plaisir, une joie de découvrir, de travailler ensemble sur le même sujet ou de s’opposer, de prolonger, de prendre le contre-pied suivant sa nature psychologique, l’état dans lequel on se trouve à ce moment-là, l‘état dans lequel se trouve le groupe à ce moment-là, son histoire, l’état de la société, de l’ontogenèse mathématique résumant la phylogenèse... bref des êtres pouvant pleinement se manifester dans un groupe vivant en développement dialectique. Et, en plus, on acquiert, on intègre des quantités de notions parce qu’on se les est reconstruites. Il ne s’agit pas essentiellement de maths, mais de prise en compte de la complexité.

            C’est vraiment lorsque j’ai étendu la méthode naturelle au domaine de l’enseignement des mathématiques que j’ai pu en proposer la définition : « Expression-création et communication dans un groupe positif. »

            Jamais, comme en cette circonstance, je n’ai pu saisir à ce point le rôle du groupe. Jusque-là, je ne l’avais que subodoré lors de la création orale collective et lors de l’expérimentation sur la langue. Mais ici, c’est encore plus net car les enfants sont tous producteurs et, comme ils sont à égalité de savoir, ils interviennent quasiment tous lors de l’examen des créations. Ils sont choqués, ils réagissent contre les outrances, les impossibilités, les failles dans le raisonnement, tout ce qui heurte les évidences... Et des timides, des peu-assurés, des convaincus-de-leur-nullité s’étonnent de voir tout ce que le groupe a pu trouver dans une création qu’ils avaient faite comme ça, sans y penser. Et les plus brillants, les plus assurés sont surpris de voir l’astuce de ceux qu’ils croyaient avoir réussi à coincer dans leurs raisonnements. Le jeu bénéfique de la proie et du prédateur se joue souvent : il faut trouver des subterfuges, inventer des impossibilités qui se révèlent souvent trouées. On croit avoir acculé l’autre dans un coin, mais il s’ouvre un espace et s’échappe en agrandissant la règle du jeu. Il faut bien en définir les règles au préalable : 5 - 8, ce n’est pas possible : mais si, dans Z, avec les nombres négatifs comme sur le thermomètre ou l’horloge. On dirait que les enfants ont à refaire le parcours de l’humanité qui a continuellement élargi son domaine en introduisant le zéro, les nombres relatifs, les rationnels, les irrationnels, les imaginaires... C’est une entrée et une exploration progressive du monde des mathématiques.

Paul Le Bohec, L’école réparatrice de destins ?, p.89 et p.90, L’Harmattan